Les Soprano – l'infinie comédie

Colloque Recherche
6 décembre 2022 - 7 décembre 2022Saint-Martin-d'Hères - Domaine universitaire
Réunissant plusieurs spécialistes et amateurs de la série, ce colloque organisé par l'UMR Litt&Arts s’attachera à explorer la complexité formelle de cette série.
« The movie never ends, it goes on and on and on. » dit le texte de Don’t Stop Believin’, la chanson du groupe Journey que l’on entend lors de la dernière séquence des Soprano. Venant apporter tout sauf un terme définitif au TV show lancé plus de huit ans plus tôt, la célèbre fin imaginée par David Chase, originale, provocatrice et profondément irreproductible, souligne à quel point la répétition à l’infini, c’est-à-dire littéralement sans fin, constitue le cœur de la série. Selon un paradoxe qui n’est pas sans accents deleuziens (le Deleuze de Différence et répétition), l’inventivité formelle de The Sopranos repose sur l’éternel retour des mêmes thèmes, figures, répliques, lieux ou situations, au gré d’un art parfaitement maîtrisé de la reprise et de la variation, d’une écriture du Même et de l’Autre. Partant d’un pitch ressemblant à une mauvaise blague (« Vous connaissez celle du Parrain du New Jersey qui doit aller voir une psy ? ») mais mettant déjà en évidence et en abyme l’importance de la sérialité et de la sérialisation dans le processus de création (des séances de psy hebdomadaires pour un TV show revenant toutes les semaines), Chase et ses scénaristes auront poussé à sa puissance maximale la singularité narrative et esthétique de la série télé en tant que forme artistique.

À l’image de ce qui se produit dans le chef-d’œuvre de David Foster Wallace Infinite Jest, auquel le colloque emprunte son titre, les répétitions et variations en chaîne créent une œuvre-monstre, monstrueuse par sa taille, par sa complexité, par l’ambition qui est la sienne (celle de faire le portrait de l’ensemble d’une société US frappée par les crises d’identité et le malaise fin-de-siècle), monstrueuse surtout par son humour ravageur. Dans la série et chez Foster Wallace, l’ironie, la dérision, la parodie, le pastiche, alliés à un épuisant comique de répétition, se lancent à l’assaut de toutes les valeurs, de tous les repères et de toutes les figures d’autorité, mettant le monde sens dessus-dessous, tout particulièrement le monde de l’art dont les hiérarchies traditionnelles révèlent leur vacuité et leur non-sens.

Réunissant plusieurs spécialistes et amateurs de The Sopranos, qui interrogeront la série à différentes échelles (un épisode, un motif, un effet esthétique récurrent…) et selon une diversité d’approches, le colloque s’attachera à explorer la complexité formelle de l’œuvre de Chase dans le prolongement d’ouvrages fondateurs comme celui d’Emmanuel Burdeau (La Passion de Tony Soprano, Capricci, 2010), ou celui de Florent Loulendo et Frédéric Foubert (Une Amérique désenchantée, PUF, 2017).

Ce colloque est organisé en partenariat avec la revue Seul Le Cinéma des étudiant·es en Études cinématographiques du Master Création Artistique de l’UGA ; à ce titre, la revue proposera le mercredi 7 après-midi une table-ronde réunissant plusieurs de ses rédactrices et rédacteurs.

► À DÉCOUVRIR OU REDÉCOUVRIR

Soirée de projection le mercredi 7 décembre de 19h00 à 22h00 dans la salle de cinéma 220 - Sonimage de la MaCI.
Séance présentée et animée par Emmanuel Burdeau (critique et auteur de l’ouvrage La Passion de Tony Soprano, Capricci, 2010), pour découvrir ou redécouvrir sur grand écran deux épisodes majeurs de la série : saison 3, épisode 2, « Proshai, Livushka » (2001) et saison 6, épisode 1, « Members Only » (2006).
Publié le  2 décembre 2022
Mis à jour le  2 décembre 2022